Une langue à part en Europe centrale – les origines de la langue hongroise

Par Csilla Vegh | 17 avril 2007

Pour citer cet article : Csilla Vegh, “Une langue à part en Europe centrale – les origines de la langue hongroise”, Nouvelle Europe [en ligne], Mardi 17 avril 2007, http://www.nouvelle-europe.eu/node/168, consulté le 02 juin 2023

Entourée par des peuples parlant des langues slaves (Slovaquie, Ukraine, articleSerbie, Croatie, Slovénie) et romanes (Roumanie) des côtés Nord, Est et Sud et par des peuples germanophones (Autriche) du côté Ouest, la langue hongroise représente une exception intéressante au coeur de l’Europe. D’où vient sa particularité ? Nous essayons de la démontrer dans cet article.

 

Son originalité

En représentant une enclave dans la masse des langues indo-européennes, le hongrois (magyar) fait partie de la famille des langues ouraliennes, plus précisément le groupe des langues finno-ougriennes, ainsi que du finnois et de la langue estonienne. Les langues ouraliennes se divisent en deux groupes : 1. finno-ougrienne et 2. samoyède. Le groupe finno-ougrien contient deux sous-groupes : finno-permien et ougrien. Le groupe finnois est divisé en plusieurs autres groupes, par exemple : langues permiennes, langues finno-volgaïques, langues fenniques (comme le Finnois et l’Estonien), etc. Le groupe ougrien contient la langue hongroise et les langues ob-ougriennes. Les langues ouraliennes sont parlées en Europe et en Asie par environ 25 millions de personnes selon les estimations. Le hongrois est parlé par environ 14-15 millions personnes, dont 10 millions de personnes vivant en Hongrie et 5 millions en dehors des frontières, principalement dans les pays voisins (minorités hongroises) mais aussi dans les diasporas hongroises importantes aux États-Unis, au Canada et en Australie notamment.

 

Son histoire mystérieuse

Quelques 15 000 années auparavant, le Nord du continent a été habité par des tribus Paléosibériennes. En conséquence du changement de climat, l’insuffisance des ressources naturelles et à cause d’autres motifs éventuels, ces tribus se sont souvent déplacées. Grâce à ces mouvements migratoires, les tribus – à l’origine unies – se sont séparées en plusieurs branches. Certains groupes ont préféré le climat nordique, d'autres ont préféré migrer plutôt vers le Sud. En simplifiant un peu, c’est ainsi, à travers divers processus de mélange et de dispersion que les principales branches des langues, présentées dans la première partie, se sont développées. En ce qui concerne les tribus hongroises, elles sont venues de l’Ouest de l’Oural et de la Volga et se sont installées dans le Bassin des Carpates à la fin du 9e siècle en asujettant en quelques années les habitants autochtones du bassin (avars, slaves, francs). Pendant leur migration, les magyars (les Hongrois) se sont mêlés avec d'autres peuples semi-nomades de l’Asie centrale, par exemple avec des khazars (peuple turc), dont l’influence culturelle sur les Hongrois était remarquable. Certains pensent que les Hongrois ont été liés aux Huns également, un peuple de l’Asie centrale, parlant une langue turque. C’est pour ces raisons qu’il y a un certain mystère autour de l’origine de la langue et que sa source exacte constitue le sujet de nombreuses discussions. En effet, selon certaines théories, la langue hongroise fait plutôt partie des langues turques, donc des langues altaïques. Certes, au cours de son histoire, grâce à l’interaction avec les autres langues, le hongrois a emprunté beaucoup de mots étrangers (slaves, turcs, germaniques, etc.), mais cela ne remet pas en cause les caractéristiques communes de la syntaxe, de la morphologie et de la phonologie avec les langues ouraliennes. Il est aussi intéressant à noter que le premier texte important écrit dans une langue ouralienne a été écrit en hongrois (Oraison Funèbre et Prière entre 1192 et 1195).

Quelques curiosités linguistiques

La langue hongroise est une langue agglutinante, ce qui signifie que des affixes s’ajoutent aux mots de base, exprimant les rapports grammaticaux. Cette caractéristique de la langue peut rendre l’apprentissage difficile pour des étrangères souhaitant étudier le hongrois. Cependant, l’utilisation de l’alphabet latin (mais auquel on a ajouté plusieurs lettres au cours des années) et la prononciation relativement facile par rapport à certaines langues slaves ou germaniques peuvent faciliter la tâche des élèves.

Le hongrois est aussi caractérisé par le phénomène de l'harmonie vocalique, ce qui veut dire que les voyelles sont regroupées en deux séries : les voyelles dites claires (voyelles d'avant e, i, ö, ü, é, í, ő, ű) et les voyelles dites sombres (voyelles d'arrière a, o, u, á, ó, ú). Le hongrois connaît les consonnes doubles également, dont l'articulation est plus longue (tt ; ggy ; nny ; ssz ; etc.). Le « h » est aspiré, donc on le prononce toujours, sauf en fin de mot ou en fin de syllabe. On pourra énumérer longuement les autres particularités grammaticales de la langue, mais trop souvent, on se contente de dire que le hongrois est une langue difficile à apprendre, parlé par peu de personne, ce qui lui donne un certain aspect exotique. En tant que langue officielle de l’Union européenne élargie, cet exotisme peut rendre plus intéressant l’apprentissage de la langue car sa connaissance peut représenter un réel atout pour la personne qui envisage de travailler au sein des institutions de l’UE. De plus, elle permet de découvrir également la richesse de la culture et la littérature hongroise.