
Construire un espace international de coopération dans l’enseignement supérieur, c’est l’ambition de Tempus, programme européen qui réunit 27 pays en Europe, en Asie centrale, en Afrique du nord et au Moyen-Orient. En quoi cela consiste ? Et comment Tempus entend renforcer la modernisation de l’enseignement supérieur ?
En 1986, l'Acte unique incluait pour la première fois dans un traité la volonté d'une « politique de cohésion ». Déclinée dans plusieurs domaines, celle-ci est aujourd'hui énoncée comme un enjeu majeur mais reste toujours aussi floue dans l'esprit de citoyens européens. Avec une Europe élargie, accueillant plus de 501 millions d’habitants, il est certain qu'un besoin de cohésion est vital, celui-ci passant par plusieurs processus de « convergence ». Suite aux élargissements successifs qui ont révélé les différences de systèmes politiques, éducatifs, administratifs, l'Union européenne (UE) s'est alors recentrée sur un mouvement de cohérence. En effet, le traité de Lisbonne exprime la volonté d'assurer « la cohérence, l'efficacité et la continuité de ses politiques et de ses actions ».
L’éducation reste de la compétence de chaque État ; mais la voilà qui s'introduit de plus en plus dans celle de l'UE. Depuis Maastricht et sa volonté de favoriser les échanges et la coopération dans l'enseignement supérieur, l'Europe a fait du chemin.
À mi-parcours des orientations stratégiques pour 2007-2013, le programme Tempus est un exemple de réussite pour ces projets de coopération, bien souvent décriés car sûrement peu connus.
Zoom sur le programme Tempus IV
Encore un programme pour nous aider et nous perdre peut-être par la même occasion ! Mis en place pour répondre au développement des universités infra et hors UE (voisinage méridional et oriental, Balkans occidentaux, cinq républiques d'Asie centrale - voir note en bas de page), il tend à aider les opérations de coopération entre diverses facultés en offrant une aide financière. En dix-sept ans, ce programme a permis la réalisation de 6500 projets auxquels 2000 universités ont participé. Cette forme de coopération, gérée par l'Agence « Éducation, audiovisuel et culture » vise à moderniser l'enseignement supérieur, en augmentant les dispositifs éducatifs ainsi que l'ouverture sur la société et l'insertion professionnelle.
Ainsi, le programme Tempus semble se positionner comme un moyen de répondre aux nouvelles exigences du monde globalisé en s'adaptant aux particularités nationales pour en faire la valeur ajoutée des enseignements proposés. La plupart des projets pour la période 2007-2013 n'étant qu'à la phase préparatoire, il serait bon de s'y intéresser de près pour ne pas louper le coche !
Un exemple de Tempus IV, le projet DEVETER
Le lancement officiel du projet DEVETER a eu lieu mi-novembre 2010, après une avoir été sélectionné en juillet 2010 par la Commission européenne. L'université Pierre Mendès France de Grenoble, moteur de cette initiative, s'est attachée au développement d'un nouveau programme d'enseignement supérieur avec des universités hors Union afin de mettre en place un Master « Développement territorial, aménagement, tourisme et mise en valeur du patrimoine » (DEVETER).
Les objectifs premiers de ce projet sont l'augmentation du corps enseignant, le développement des réseaux professionnels, la création des partenariats entre universités et la mise en réseau des travaux et des résultats. Tous ces procédés sont développés dans un souci de qualité venant faire écho à la stratégie de Lisbonne et sa « société de la connaissance ». De plus, le projet fait partie des échanges multilatéraux, ce qui renforce l’influence de l’UE sur le plan international, mais aussi intègre des pays non membres en les finançant dans leur démarche.
Les six universités (hors Union) bénéficiaires se trouvent en Algérie, au Liban ainsi qu'en République arabe syrienne. Celles-ci vont alors voir émerger au sein de leur faculté ce nouveau master venu d'une volonté commune. Dans un premier temps, cet enseignement devrait former des professionnels capables de répondre aux besoins de leur pays. Ainsi, des partenariats avec des entreprises sur place sont élaborés.
Pourtant, arriver à un consensus reste difficile... En effet, le budget alloué par la Commission européenne ayant été réduit, les déplacements pour mener à bien cette initiative seront alors parfois substitués par des visio conférences, ce qui implique un haut niveau d'équipement. Cette contrainte prévisible n'est pas le problème majeur du DEVETER qui se heurte à des difficultés d'élaboration des maquettes. En effet, afin d'être habilitées par les autorités de tutelle, les différentes universités doivent s'accorder sur le fond de la formation. Or, l'objectif du programme Tempus n'étant pas d'imposer un modèle unique de formation mais de s'adapter aux différents besoins et environnements des pays participants, un certain manque de clarté subsiste. Comme tout projet de coopération, la volonté de préserver les particularités de chaque acteur tout en se dirigeant vers un projet commun est souvent la phase la plus sensible. De plus, les systèmes éducatifs étant différents d'un pays à l'autre, le pouvoir décisionnaire ne revient pas toujours aux seules personnes impliquées dans le projet. Les intérêts de chacun sont donc soumis à de multiples facteurs extérieurs.
Fondée sur l'échange de bonnes pratiques par la mise en commun des différentes expériences et avancées du programme, la dernière phase d'application pour la période 2011-2013 (pour les deux années de master) sera ponctuée tous les six mois par des conférences réunissant tous les représentants afin de contrôler, critiquer ou applaudir.
Ceux qui bénéficient de Tempus
Les premiers concernés par ce type de projet sont donc les futurs étudiants de ces masters mais aussi les entreprises qui bénéficieront d'une main d'œuvre supplémentaire grâce à la mise en place d’un dispositif d’alternance. En effet, la majorité des villes, voire des pays concernés, sont à la recherche de professionnels qualifiés et opérationnels. S'il n'est pas encore franchement développé, l'apprentissage par alternance apparaît ici comme une clef pour l'employabilité des étudiants, devenant un axe majeur de la quatrième phase des Tempus.
Les universités semblent être aussi bénéficiaires de cette démarche car elles augmentent ainsi leurs partenariats internationaux et le développement de leur offre d'apprentissage. Enfin, cette initiative apparaît comme un moteur de compréhension des peuples, qu'elle soit au niveau européen ou international. L'Union européenne avec son si controversé processus de Bologne se donne ainsi les moyens de devenir plus transparente pour les étudiants, européens ou non.
Finalement, est-ce une véritable avancée ? Oui, la coopération étudiante est celle qui semble marcher le mieux au niveau européen. Qui n'a jamais entendu parler ou bien même bénéficier du programme Erasmus ou Socrate ? L'ouverture aux universités internationales, qui pourrait aboutir à un véritable échange, se place dans la lignée de cette fameuse initiative.
À l'heure actuelle, plusieurs projets sont en cours, notamment le financement de structures de communication universitaire (par le Tempus Stratégicom). Cela apparaît comme un élément de victoire pour cette forme particulièrement appréciée de coopération.
Si les programmes Tempus précédents semblent avoir été une réussite il est encore trop tôt pour juger en globalité l'efficience de ces projets. En effet, les idées fleurissent ; mais attendons l'heure des bilans pour évaluer l'efficacité de ces actions.
Universitaires, étudiants, professionnels, êtes-vous partants ?
Sachez que la clôture des dossiers de candidature pour la demande de financement d'un projet est fixé au 15 février 2011, midi, heure de Bruxelles !
Note : il s'agit des pays suivants ; Kazakhstan, Kirghizistan, Tadjikistan, Turkménistan et Ouzbékistan.
Pour aller plus loin
Sur Internet
- Tempus: modernising higher education in EU neighbours , European Commission Education and Training
- Le site Euractiv
- Le site Eurocircle
- Liste des projets sélectionnés par Tempus
- Pour aller plus loin, un numéro de l'Unesco sur l'internationalisation des études supérieures
Source photo : library books, par timetrax23, sur flickr