Conseil de l'Europe et Union européenne, ne plus les confondre

Par Philippe Perchoc | 18 mars 2007

Pour citer cet article : Philippe Perchoc, “Conseil de l'Europe et Union européenne, ne plus les confondre”, Nouvelle Europe [en ligne], Dimanche 18 mars 2007, http://www.nouvelle-europe.eu/node/141, consulté le 24 mars 2023

 

Nous fêtons cette année les cinquante ans du Traité de Rome, pourtant la CEE n'est pas la première forme d'organisation européenne. Le Conseil de l'Europe a été, tout de suite après la guerre, le premier outil de la construction européenne et malgré une crise d'identité, elle reste un forum très important du dialogue européen sur les Droits de l'Homme.

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Au sortir de la guerre, assurer la paix en Europe

A la fin de la seconde guerre mondiale, les Européens comprirent que seule l'union des nations permettrait d'assurer une paix durable.

Néanmoins, leur vision de la nouvelle organisation du continent était très différente d'un pays à l'autre. Certains Français et les Bénéluxiens pensaient déjà à une organisation fédérale alors que les Anglais y étaient fermement opposés. Pour eux, seule une organisation intergouvernementale de coopération était envisageable. L'accord a eu lieu autour d'un compromis minimal en 1949.

La première enceinte européenne

Les objectifs fixés à cette nouvelle institution étaient très larges :

  • "réaliser une union plus étroite entre ses membres pour la sauvegarde des idéaux et principes démocratiques qui constituent le patrimoine commun des Etats membres"
  • "promouvoir le développement économique et social de ceux-ci" 

A la base, le champ d'action était presque universel sauf pour les questions de défense que les pays neutres récusaient. Au fur et à mesure que d'autres formes de coopérations se sont créées, elles ont été exclues du champ d'action du Conseil de l'Europe.

  • l'OECE (organisation européenne de coopération économique) créée pour gérer le Plan Marshall et qui gérait les questions économiques depuis 1948.
  • la CECA (communauté européenne du charbon et de l'acier), en 1951, entre les 6 Etats fondateurs (France, Allemagne, Italie et Benelux) et qui est le noyau de l'UE

Donc, l'action du Conseil de l'Europe s'est davantage développée dans les domaines des droits de l'Homme, de la coopération juridique, du domaine social, de la coopération culturelle et éducative, de la coopération éducative...

Mais les moyens d'action sont resté limités

S'étant mis d'accord sur les principes et les domaines, les Britanniques exigèrent que le Conseil de l'Europe reste une organisation purement intergouvernementale où les décisions se prennent à l'unanimité.

Les outils de l'action du conseil de l'Europe sont donc purement intergouvernementaux: examens et rapports, traités internationaux négociés en son sein, actions communes  et recommandations

Les moyens financiers sont composés de la prise en charge de ses frais de représentation auprès de l'organisation par chaque Etat, d'une contribution pour frais généraux à hauteur de la population de chaque pays.

Les espoirs des fédéralistes européens furent vite déçus, ce qui les conduisit à imaginer d'autres formes de coopérations plus étroite : la CECA en 1951, puis la CEE en 1957.

Les membres

Les 10 membres fondateurs étaient la France, la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg, le Royaume Uni, l'Irlande, le Danemark, la Norvège et la Suède. Aujourd'hui, le Conseil de l'Europe compte 46 Etats membres.

L'adhésion

Pour adhérer, il faut être :

  • un Etat européen: comme pour l'Union européenne, mais ici l'acceptation est bien plus large. La Turquie a été un des premiers Etats membres, aujourd'hui, la Russie et même les pays du Caucase comme la Géorgie sont membres.
  • adhérer aux valeurs démocratiques : c'est le Conseil des Ministres qui évalue la candidature mais il n'outrepasse jamais l'avis de l'Assemblée. Par ailleurs, depuis 1989, il est admis qu'un Etat doit adhérer à la Convention Européenne des Droits de l'Homme pour être accepté.

Les institutions du Conseil de l'Europe

> L'Assemblée

Elle compte 630 membres qui sont délégués des parlements nationaux. Ainsi, en France, ce sont 18 députés et les sénateurs qui nous représentent à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe. Elle est maîtresse de son ordre du jour, elle élit les juges de la Cour Européenne des Droits de l'Homme (la Cour de Strasbourg qui surveille que les Etats appliquent bien la Convention Européenne des Droits de l'Homme), le commissaire aux droits de l'Homme et le secrétaire général de l'organisation. Ses avis ne sont que consultatifs.

> Le Comité des Ministres

C'est lui qui prend toutes les décisions. Il est composé du ministre des Affaires étrangères de chaque Etat membre. La présidence tourne entre les Etats membres tous les 6 mois (mai/ novembre). Le Comité des Ministres vote à la majorité des 2/3 en droit, mais en réalité, toutes les décisions se prennent à l'unanimité.

> Le Commissaire aux droits de l'Homme

Depuis 1999, il assure les missions suivantes :

  • promouvoir dans les Etats membres l'éducation et la sensibilisation aux droits de l'Homme
  • encourager la mise en place de structures nationales de droits de l'Homme là où elles font défaut et stimuler les activités de celles déjà existantes
  • identifier de nouvelles insuffisances dans le droit et la pratique des Etats quant au respect des droits de l'Homme
  • contribuer à la promotion de leur respect effectif et de leur pleine jouissance.

> La Cour Européenne des droits de l'Homme

Elle a été instaurée par la Convention Européenne des droits de l'Homme. Composée du même nombre de juges que d'Etats membres, elle s'assure que les Etats respectent les engagements qu'ils ont pris dans le cadre de la convention et éventuellement les condamne.

Les juges sont élus pour 6 ans par l'Assemblée du Conseil de l'Europe. Deux juges peuvent être de la même nationalité. D’après son règlement, la Cour se divise en quatre sections, dont la composition, fixée pour trois ans, doit être équilibrée tant du point de vue géographique que du point de vue de la représentation des sexes et tenir compte des différents systèmes juridiques existant dans les Etats membres.

Le Conseil de l'Europe et l'Union européenne

Ne pas confondre :

  • Le Conseil de l'Europe et l'Union européenne sont des organisations internationales différentes, mêmes si tous les membres de la seconde sont membres de la première. La première compte 46 membres, la seconde 27 (depuis l'entrée de la Bulgarie et de la Roumanie). La première s'occupe avant tout de droits de l'Homme et de coopération culturelle et judiciaire. La seconde, même si elle a diversifié son action pour devenir politique, est avant tout économique. 
  • Le Conseil de l'Europe et le Conseil de l'Union européenne. Le Conseil de l'Europe est une organisation internationale regroupant 45 Etats européens. Le Conseil de l'Union européenne ou "le Conseil" est une institution de l'Union européenne qui regroupe les ministres des 27 Etats membres de l'Union européenne.
  • La Cour de Justice des Communautés Européennes est à Luxembourg, elle juge le respect du droit de l'Union européenne.
  • La Cour Européenne des Droits de l'Homme est à Strasbourg, elle juge les respect de la Convention Européenne des Droits de l'Homme.